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Entretien avec Didier Michaud-Daniel, Directeur général de Bureau Veritas

Publie le 24.06.2020
#Interview

Directeur général de Bureau Veritas depuis plus de huit ans, Didier Michaud-Daniel évoque la situation financière du groupe et les challenges auxquels il doit faire face.

Les résultats 2019 de Bureau Veritas sont-ils conformes à la trajectoire fixée ?

Pour l’exercice 2019, le groupe prévoyait une solide croissance organique du chiffre d’affaires,
une amélioration continue de la marge opérationnelle ajustée à taux de change constant et une génération

de flux de trésorerie maintenue à un niveau élevé. Nous avons atteint cette feuille de route avec d’excellents résultats. Nous avons franchi la barre des 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires, en hausse de 6,3 % par rapport à 2018. La croissance organique a été de 4,3 %, avec une légère accélération au deuxième semestre. Nous avons terminé l’année avec la meilleure croissance organique trimestrielle jamais enregistrée en sept ans, soit 5,3 % ! La marge opérationnelle s’élève à 16,3 %, en progression de 50 points de base. Enfin, les flux de trésorerie disponible sont en croissance de 29,2 % par rapport à l’exercice précédent, à 618 millions d’euros.

Ces performances démontrent la robustesse et le potentiel de croissance de notre portefeuille et la pertinence du nouveau modèle économique du groupe. Ce modèle, nous l’avons réorienté avec succès au cours des cinq dernières années et nous pouvons être fiers du chemin parcouru.

Cette année a été marquée par de nombreuses turbulences à l’international (guerre commerciale américano-chinoise, embargos, plus récemment crise du Covid-19…). Comment une entreprise comme Bureau Veritas, très exposée à toutes les zones géographiques concernées, surmonte-t-elle les incertitudes ?

Il y a presque cinq ans, Bureau Veritas a mis en oeuvre une stratégie visant à améliorer son profil de croissance, sa résilience et sa profitabilité. Aujourd’hui, Bureau Veritas est donc plus diversifié et moins exposé aux cycles sectoriels conjoncturels. Il n’en reste pas moins que certains bouleversements imprévisibles peuvent surgir dans la vie des entreprises. Concernant la pandémie de Covid-19, notre priorité absolue concerne la sécurité de nos collaborateurs : Bureau Veritas suit attentivement la situation et a pris toutes les mesures appropriées pour protéger ses employés.
La période post-confinement est très sensible pour les entreprises. Nous avons ainsi lancé un plan visant à soutenir la reprise d’activité dans les conditions de santé, de sécurité et d’hygiène adéquates dans tous les secteurs de l’économie, intitulé « Redémarrez votre activité avec BV » (voir ci-après).

Sur le plan économique, la situation aura bien un impact sur la performance 2020. Cependant, les fondamentaux de Bureau Veritas sont solides et nous avons confiance dans notre capacité à développer notre groupe à moyen et long termes, en confortant notre réseau géographique et nos positions de leader sur nos marchés.

Vous dites qu’à l’heure de l’économie mondialisée, la transparence est considérée comme le « nouvel étalon-or de la confiance ». La transparence jusqu’où ? La profusion d’informations, notamment extrafinancières, ne nuit-elle pas à la pertinence de l’information pour l’utilisateur final ?

La transparence est, en effet, le nouvel étalon-or de la confiance et apparaît comme un rempart indispensable contre de potentiels dysfonctionnements économiques, sociaux et environnementaux. Du fait de la mondialisation de l’économie, les chaînes de valeur sont devenues extrêmement complexes ; elles peuvent compter des dizaines de fournisseurs et d’intermédiaires éparpillés partout dans le monde. C’est cette complexité qui peut générer une certaine opacité et, de fait, une certaine défiance.

Selon moi, la transparence autour d’un produit revêt trois notions clés : la garantie de l’origine, l’assurance de qualité et la mesure de l’impact sociétal. Garantir l’origine, la qualité ou l’éthique des processus de fabrication demande l’expertise et le sceau de sociétés comme Bureau Veritas.
La transparence ne doit pas être de l’autoproclamation. Elle doit reposer sur des méthodologies portées par des tiers de confiance, experts, impartiaux et indépendants.

Quant à la pertinence des informations, elle ne réside pas dans leur volume, mais dans leur qualité, et dans la qualité de leur interprétation. Il s’agit de décrypter les données brutes les plus complexes, de définir les informations les plus essentielles, les plus pertinentes à partager. C’est le travail de Bureau Veritas : l’ère du big data doit devenir celle du right data.

Le métier d’origine de Bureau Veritas est d’assurer la conformité. Progressivement s’est imposée l’exigence de traçabilité. Aujourd’hui, les industriels doivent aussi répondre aux aspirations sociétales (environnement, éthique, etc.). Quelles sont les actions de Bureau Veritas dans ces domaines ? 

En effet, nos clients nous demandent de les aider à prouver leurs engagements dans des domaines très variés. Je vous en cite quelques-uns : les bâtiments et infrastructures durables, efficaces et sûrs ; les énergies plus vertes et la transition vers un avenir sans carbone ; l’économie circulaire ; la sécurité alimentaire, la qualité et la traçabilité, l’agriculture durable ; les objets connectés sûrs, sécurisés et respectueux de l’environnement ; la protection de l’environnement, le respect des droits de l’homme et les conduites éthiques sur l’ensemble de leur chaîne de valeur.

Nos clients souhaitent aussi que nous comprenions la complexité de leurs environnements opérationnels et de leurs besoins. Par exemple, il peut s’agir de la traçabilité de leur chaîne d’approvisionnement. Ils peuvent aussi s’inquiéter au sujet des avancées technologiques dont dépendent leurs divers secteurs d’activité. La richesse de nos champs d’intervention répond à de multiples besoins : évaluations indépendantes, courbes de progression, référentiels de conformité, Key Performance Indicators (KPI), mesure des impacts…

Nous accompagnons aussi nos clients quand ils développent une démarche plus volontariste pour élaborer leurs propres standards et référentiels.

Pour les années à venir, quels sont les grands rendez-vous de Bureau Veritas ?

Tout d’abord, la digitalisation. L’expertise reconnue que nous avons développée depuis deux cents ans dans le monde réel doit continuer à être transposée dans le monde digital.

Un certain nombre de technologies numériques – comme l’intelligence artificielle ou la blockchain, pour ne citer qu’elles – sont en train de métamorphoser l’économie mondiale et les modèles opérationnels des entreprises. Nous nous sommes déjà positionnés sur le sujet – notamment via un partenariat avec Microsoft dans l’intelligence artificielle en 2018 –, et je souhaite que nous poursuivions notre dynamique.

Les nouveaux services TIC liés au digital doivent permettre à Bureau Veritas de développer un nouveau marché, celui des tests et de la certification des produits et services digitaux ; par exemple, la certification de la cybersécurité ou de la protection des données personnelles, les tests de capteurs, de connectivité, etc.

Ensuite, nous devons rester incontournables dans le domaine de la responsabilité sociétale, en aidant nos clients à apporter la preuve de leur engagement en la matière, sur l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement. À titre d’exemple, nous avons lancé Circular+ en 2019, une suite de services d’audit et de certification axés sur la préservation des ressources naturelles, le recyclage des déchets, la gestion environnementale, l’optimisation de la consommation d’énergie et la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Mais cela n’est que le début !

Redémarrez votre activité avec BV

Bureau Veritas a déployé une suite de solutions, intitulée « Redémarrez votre activité avec BV », pour accompagner les entreprises, de toute taille, dans leur phase de redémarrage, et cela dans le respect des conditions sanitaires adéquates.

À travers l’initiative « Redémarrez votre activité avec BV », Bureau Veritas met son expertise en matière de processus de certification et de maîtrise des risques liés à la santé, à la sécurité et à l’hygiène au service de la reprise économique.

Dans le cadre de cette initiative, un écosystème digital a été développé pour répondre à deux exigences des entreprises et des autorités publiques :

  • la traçabilité, en leur procurant des tableaux de bord comportant toutes les informations et indicateurs clés de performance collectés sur le terrain, et une vue complète de leur conformité, au niveau global ou sur un établissement donné ;
  • la transparence, en donnant la possibilité au grand public de vérifier qu’un établissement dispose d’un label en cours de validité, et de repérer d’autres lieux disposant de labels valides sur une carte géographique. Toutes les informations fournies sont réutilisables par les clients, sur leurs propres sites Web ou applications, et par des tiers selon le principe des données ouvertes (open data).