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Entretien avec Alain Missoffe, coauteur du livre Femmes de fer

Publie le 24.06.2020
#Interview

Le livre Femmes de fer – Elles ont incarné la saga Wendel, coécrit par Alain Missoffe et Philippe Franchini et publié le 4 juin dernier aux éditions Tallandier, est un hommage aux femmes d’exception de la famille Wendel. Alain Missoffe nous en dit plus sur cet ouvrage.

Votre nouveau livre, Femmes de fer, elles ont incarné la saga Wendel, coécrit avec Philippe Franchini, est paru fin juin. Quel est le fil conducteur de cet ouvrage ?

Femmes de fer est une fresque historique qui part de la Révolution française et nous conduit jusqu’à la Ve République, retraçant le parcours étonnant de 15 femmes d’exception appartenant toutes à la famille Wendel. Cette fameuse lignée d’industriels lorrains a marqué l’histoire économique de notre pays, et représente un exemple rare de continuité entrepreneuriale sur plus de trois siècles.

Dans ce livre, les lecteurs découvrent notamment Marguerite et Joséphine de Wendel, véritables
« maîtresses de forges » et patronnes aux XVIIIe et XIXe siècles. Ou encore Berthe, qui va connaître les affres de l’occupation de la Moselle par les Allemands, après la chute du second Empire, et créer l’Union lorraine, structure emblématique du soutien apporté à la population lorraine. Andrée et Hélène de Wendel nous entraînent dans le Paris des Années folles. Deux petites-filles Wendel, la (future) maréchale Leclerc et Élisabeth de La Bourdonnaye (qui épousera le professeur Robert Debré après la guerre), et les trois filles de cette dernière, seront au coeur de la Résistance et de la France libre. Il y a aussi Françoise Schneider, passionnée d’aviation, aux côtés de son mari Jean, un héritier des métallurgistes du Creusot. Marguerite de Mitry, Renée Seillière et Ségolène de Wendel illustrent l’engagement social des femmes de la famille, particulièrement en Lorraine. Et, enfin, les lecteurs découvriront Hélène Missoffe, première descendante de Jean-Martin de Wendel, fondateur de la dynastie, qui entra au gouvernement en 1977.

À l’heure où les questions de parité sont au coeur des enjeux sociétaux, en quoi était-il important, pour vous, de dresser le portrait de ces femmes qui ont marqué la dynastie Wendel ?

Il nous est apparu qu’une des raisons de l’incroyable résilience de cette famille d’entrepreneurs, de 1704 à nos jours, était également à rechercher du côté des femmes. Ces 15 femmes qui ont retenu notre attention, qu’elles aient joué un rôle au sein de l’entreprise ou dans d’autres domaines, partagent toutes des qualités qui ont été mises en œuvre pour faire face aux nombreux accidents de l’histoire : énergie, créativité, esprit d’entreprise, autorité, caractère bien trempé, courage, générosité, sens du devoir. Et au fond, un goût profond pour la liberté.

Ce sont des femmes qui ont choisi leur destin, qui l’ont voulu, qui ne l’ont pas subi, sans pour autant se révolter par rapport à leur milieu. Prenez les « fondatrices », Marguerite et Joséphine. Hors de toute idéologie, elles ont concrétisé les revendications des premières féministes de leur époque (Olympe de Gouges, George Sand). Au fond, ce qui apparaît clairement, dans ce livre, c’est que nos
« femmes de fer » ont été avant tout des femmes libres.

Parmi ces 15 figures féminines, quelle est celle qui vous inspire le plus ?

Question difficile tant toutes nos héroïnes sont attachantes. Mais ce sera Marguerite de Wendel, la fameuse Madame d’Hayange. Devenue veuve en 1784, elle reprend les forges avec détermination. C’est une cheffe d’entreprise avant l’heure qui se fait respecter. Monarchiste de coeur, elle choisit la France et n’hésite pas à répondre aux commandes des armées de la Révolution pour faire face aux menaces étrangères. Elle est une patriote avant tout. Alors que la quasi-totalité de ses descendants ont dû émigrer pour échapper à la Terreur, elle reste à Hayange, subissant quotidiennement le harcèlement et les humiliations des autorités locales. Elle tient la barre de main ferme, ne renonce jamais, vit très douloureusement l’exécution d’un de ses petits-fils et la mort, de désespoir, à Weimar, de son fils, François-Ignace, ingénieur génial, homme des Lumières, devenu proche de Goethe.
Elle se retrouve emprisonnée à Metz, puis, après la fin de la Terreur, retourne à Hayange, dévastée.
Elle meurt à Metz, dans un total dénuement. C’est une Lorraine, une Mosellane, une femme qui ne transige pas avec ses principes.